“En cette année 2017, une gazette du Far West de la Wallonie profonde publiait un article, évoquant le blanchiment d’argent sur des comptes financiers peu honorables. Un mot retint toute mon attention : Palimpseste.
Mes proches ne tardèrent pas à me révéler la définition suivante : le Palimpseste, du grec ancien παλίμψηστος / palímpsêstos, «gratté de nouveau», est un Manuscrit écrit sur un parchemin déjà utilisé par des auteurs anciens.
Les copistes du Moyen Âge faisaient disparaître les inscriptions en les recouvrant d’un nouveau texte. Le résultat pouvait laisser supposer ou
apparaître des traces de l’historique des versions antérieures.
Curieux de nature, j’interrogeais les différents termes de la définition et les confrontais, par jeu, à la pratique que je développe en ce moment.
– « Manuscrit ». C’est bien ma main qui trace les « miniatures » que je crée. Armée d’un stylet, plume, pinceau ou grattoir, c’est bien elle qui
dessine les arabesques, délimite les surfaces,
suggère des ombres dans un mouvement continu et inspiré.
– « Parchemin d’auteurs anciens ». Au parchemin, je préfère le tirage photographique sur papier. Photographies d’origines et d’époques
diverses. J’ignore tout sur les auteurs et acteurs figurant sur les clichés. Ils ont vécu d’autres temps. Ils peuvent être considérés comme des « auteurs anciens ». Pourquoi pas ?
– « Copiste » ? Non, je ne transcris pas. Je ne copie pas de textes. Mon imagination compose ce que j’appellerais de « nouveaux paysages ».
– « Moyen Âge ». Le Moyen Âge me parle d’une époque lointaine. J’appartiens plutôt à une époque dite « moderne » (encore que…).
– « Effacer, faire disparaître ». Il y a de cela dans ma pratique. À la soude, à l’eau, aux larmes, je lave, je gratte, je lisse, je ponce jusqu’à l‘évanouissement de l’épreuve originale sans qu’elle ne disparaisse totalement, définitivement.
– « Recouvrir d’un nouveau texte ». Pourquoi le nier ? Je m’applique à « recouvrir » de traces, lignes, aplats, silhouettes, une surface dont j’ai, partiellement ou entièrement, « gommé » le premier visage. Il ne s’agit pas de texte à proprement parler. Mais qui pourrait affirmer que tous
les graphismes, que tous ces signes combinés ne finissent pas par engendrer un alphabet composant une sorte de « texte » abstrait, sibyllin, abandonné à la lecture du regard ?
La relecture des notes m’inspira quelques idées. Ce fut la révélation.
Mais bon sang. Mais c’est bien sûr !
Je « palimpsestais » sans le savoir ! ”
André Huet